• Le mystère de l'étang-aux-ormes. page -172-

     Le mystère de l'étang-aux-ormes. Page -34-  

    Pendant que Isabelle était plongée dans ses tristes pensées, un danseur vint l’inviter et un autre proposa aussi à Catherine de danser. La jeune comtesse, prétextant une migraine et une fatigue subite, s’éclipsa en passant dans le petit salon pour sortir par une des portes vitrées qui donnaient sur la terrasse.

    Des invités se promenaient dans le parterre où se formaient des groupes et où l’on causait en fumant.

    Quelques lampes aux verres de couleurs répandaient une discrète lumière. Ludivine, silhouette claire au bord de la terrasse, riait doucement entourée d’un groupe de jeunes femmes jacassantes et de jeunes hommes occupés à faire leur cours à certaines d’entre elles. Isabelle se glissa dans la pénombre, le long de la charmille qui bordait le parterre inférieur. Elle sentait dans tout son être comme une grande confusion et une fatigue inaccoutumée. Fallait-il l’attribuer à cette chaleur étouffante ? La lourdeur de l’air l’empêchait de respirer correctement. Son souffle était court. L’orage n’était pas loin. Ne ferait-elle pas mieux de regagner la vieille tour au plus vite ? Cette atmosphère moite ne dissipait pas son malaise. Elle avançait d’un pas hésitant, le long du petit miroir d’eau où se reflétait la lumière voilée d’une lampe au verre de couleur qui tirait sur le rouge orangé. Une autre du côté du temple de l’amour, éclairait légèrement le jeune cupidon potelé et son carquois chargé de flèches. Isabelle contourna la petite colonnade de marbre rose et s’avança vers la balustrade qui terminait le parterre ou elle retrouva un peu de souffle. Mais quelqu’un s’y trouvait déjà. Un homme se tenait debout, les bras croisés, face à la campagne qui s’étalait dans la nuit.

    Il se détourna en entendant des pas et eut une légère exclamation en apercevant Isabelle qui s’était immobilisée. Pour se donner une contenance, elle osa ces quelques mots :

    Ah ! C’est vous, William !

    Sa voix avait une intonation d’allégresse.

    Vous en avez eu assez, comme moi ?

    Elle s’approcha de lui, un sourire détendant ses lèvres qui, l’instant d’avant, étaient crispées par cette mystérieuse angoisse qui l’étreignait.

    Ah ! Tout à fait assez ! Je l’ai dis à Ludivine et j’ai filé à l’Anglaise. Je comptais descendre par le sentier, mais il m’a pris l’idée de venir ici respirer l’air frais que la nature procure ici...

    Quel étrange accent avait prit sa voix ! Et ce ton d’insouciance affecté... Isabelle cessa de sourire. Un frisson la parcourut. Comme un coup d’aile, une inquiétude, dont le mystère se faisait de plus en plus précis, venait de passer sur son âme.Voulant se rassurer, elle trouva l’excuse de son mal de tête et de sa fatigue subite :

    Je venais chercher, moi aussi, un peu d’air dans ce lieu ombragé le jour, et je crois que c’est bien utile ce soir, car dans les salons, l’air est irrespirable.

    Avec tout ce monde, ces hommes qui fument, les bavardages incessants, ce peintre prétentieux et cette chaleur étouffante ! Je me retrouve avec une atroce migraine. Le plus raisonnable serait que j’aille me coucher. Bonsoir. Catherine sait que je me suis retirer parce que je me sentait souffrante.

    Certainement. Je vais en faire autant. Bonsoir Isabelle.

    Elle lui tendit sa main brûlante, moins encore peut-être que celle qui la serra d’une brusque étreinte.

    Mais qu’avez-vous, Isabelle ? Vos mains sont brûlantes et votre voix n’est plus la même.

    Il pencha son visage vers le siens pour tâcher d’apercevoir ses yeux au milieu de cette pénombre.

    Vous souffrez, dites-vous ?

    J’ai éprouvé une vive émotion très pénible en entendant confirmer par Adélie ce que je soupçonnais déjà depuis longtemps.

    Que soupçonniez-vous ?

    Que mère a souffert par la faute de mon père et de sa maîtresse qui est aujourd’hui… notre belle-mère.

    William dit à mi-voix, avec une douceur compatissante :

    Pauvre Isabelle !

    Vous le saviez, William ?

    Non. Je n’étais pas au courant de l’adultère de votre père.

     

    Ma mère m’avait vaguement parlé de votre mère, de son air triste, mais sans en connaître la raison. Ma mère aimait beaucoup votre mère. En tout premier lieu, Elle tint quelque rigueur à la nouvelle comtesse de Rubens de s'être faite épousée sans attendre la fin du deuil de votre père ; mais elle se laissa prendre ensuite par cette habile et astucieuse femme. Malheureusement, j’ai été assez fou pour en faire autant, acheva-t-il entre ses dents.

     172

    sceau copyright  

     

     

    « Le mystère de l'étang-aux-ormes. Page -132-Le mystère de l'étang-aux-ormes. page -173- »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :